L'EDITO 88

AG 2016 de l’AAIHP
Rapport moral du président

Emmanuel Chartier-Kastler
(Promotion 1984)
Président de l’AAIHP
PU- PH
Hôpital Universitaire de la Pitié-Salpêtrière


Chaque année* nous présentons statutairement le bilan de nos activités devant vous, et cet exercice qui pourrait être routinier revêt une importance majeure pour votre Bureau. En effet sans ces points réguliers, nous ne reconnaîtrions pas les progrès effectués et les difficultés rencontrées. Notre Secrétaire général vous rapportera les activités passées et la grande étape de l’année qu’a été la rénovation de notre base de données avec un changement de logiciel (rapport d’activité disponible sur : www.aaihp.fr/AssembleeGenerale.php) et je l’espère un saut qualitatif vers le numérique via internet pour tous.

Tous nos plus jeunes collègues pourront, je l’espère, dans un avenir proche se connecter à leurs données personnelles et cotiser en ligne. Ce qui pourrait paraître pour certains une évidence est pour une association comme la nôtre, un effort humain et financier très important. Que nos permanents, Doriane de Nazelle et Dominique Carré trouvent ici l’expression de notre gratitude pour l’effort accompli.

Tournons-nous maintenant vers les perspectives à venir. La plus importante est la mise en place de la réforme pédagogique du DES qui arrive pour la rentrée 2017. Elle va représenter un bouleversement supplémentaire de la formation des plus jeunes et pour nous, AIHP, nous conforte vers les choix statutaires actés l’an passé pour notre devenir. La formation de spécialistes est à l’avenir ancrée dans un statut et une formation très étudiante de troisième cycle, plus encadrée par les tuteurs et coordonnateurs de DES mais aussi moins responsabilisante. Nous ne pouvons que le constater, le déplorer et profiter de l’occasion pour rappeler à nos plus jeunes collègues que, sans stigmatiser ni mettre au ban la médecine générale, cette dernière n’obéit définitivement pas au même processus de formation et d’enseignement. Nous l’avons toujours dit et écrit, nous avons toujours soutenu l’idée que la médecine générale devait être élevée dans sa qualité de formation et d’encadrement au rang de toutes les spécialités, mais les faits restent têtus et nous font regretter parfois le temps qui passe. Pour tous ceux d’entre vous qui ne suivent pas cette actualité de près, sachez que dès la prochaine rentrée toutes les spécialités sont filiarisées et dépendantes d’arrêtés fixant le nombre de postes accessibles au choix pour les jeunes classés de l’ECN. De notre côté, il nous faut définitivement attirer et regrouper les jeunes spécialistes (médecine générale incluse) pour souder la profession et entretenir cet esprit de corps au bénéfice des patients.

Un sujet ne peut être occulté lors de notre AG, c’est celui du harcèlement et des requêtes des internes en exercice pour voir certaines pratiques disparaître. Nous ne pouvons en aucun cas tolérer le moindre harcèlement moral ou physique lors de la formation au contact des équipes universitaires et hospitalières qui encadrent les internes en exercice (étudiants de troisième cycle) ; voir l’article de Jean-Pierre Brunet dans ce numéro, ndlr. Cependant la limite entre un compagnonnage actif et exigeant et la perception d’un harcèlement par le collègue (horaires de travail, demande d’investissement intellectuel,…) peut être ténue. Nous avons tous en souvenir ces heures de travail indues, non rémunérées et harassantes pour ne pas laisser au « patron » l’impression de la tâche inachevée au contact des patients. Ce souvenir ne doit pas être enjolivé pour devenir une base normale de raisonnement. Il me vient pour ma part la réflexion suivante : si l’hôpital, et je ne parle que de lui pour l’instant, fonctionnait avec les personnels adaptés à chaque tâche et respectant les missions de chacun, aucun interne ne percevrait cette sensation de harassement. Nos structures doivent balayer devant leur porte au regard des faits récents. Notre générosité naturelle dans la délivrance du soin a laissé dériver leur organisation vers des exigences inadmissibles.

Je vous livre cette idée à l’occasion de notre AG, mais ne devrionsnous pas analyser les fiches de postes des missions de l’étudiant de troisième cycle et de l’assistant post troisième cycle pour les protéger et exiger d’eux l’investissement intellectuel et universitaire nécessaire à la préparation du bon spécialiste médical. La mission Compétences d’Yves Matillon il y a plusieurs années, comme la préparation des core curriculum de chaque discipline vont dans ce sens pour la partie intellectuelle de chaque discipline. Pourquoi ne pas écrire clairement les missions attendues, et par effet miroir, les missions qui ne leur sont pas dévolues, aux étudiants DES dans le fonctionnement hospitalier ? Ceci afin de les protéger et que nous réinvestissions ce champ de l’organisation du soin hospitalier.

L’autre perspective majeure de l’année écoulée et à venir est celle de la dégradation constante et aggravée du déficit de nos hôpitaux publics. Ils sont la victime désignée (avec les établissements privés) pour transférer le déficit des comptes de santé… Comment peut-on imaginer que nos plus jeunes collègues soient formés dans la sérénité et dans l’optimisme à travailler dans des structures dont les moyens quotidiens sont en dégradation constante ?

Après ces réflexions concernant notre environnement, permettez au président que je suis de regretter que nous n’arrivions pas à avoir plus de cotisants annuels à l’AAIHP. Nos actions n’en seraient que plus nombreuses et notre entraide (aide aux familles) plus large. Vous savez mon attachement à défendre la pérennité de l’AAIHP contre vents et marées et afin d’attirer les plus jeunes collègues, je plaide pour des cotisations adaptées dans leurs périodes de formation afin qu’ils intègrent l’esprit de corps. Notre trésorier saura y travailler et faire des propositions en ce sens. L’accès numérique facilité devrait y contribuer. Il nous faudra savoir créer des événements à l’occasion du 135ème anniversaire de notre création en 2018.

Enfin et pour conclure, je vous rappelle notre engagement à travailler sur l’histoire de l’AAIHP et de ses membres pendant la Grande Guerre. Je souhaite vivement que nous puissions pour l’année prochaine, et si possible le 11 novembre 2018, produire un document historique et prendre part à des événements commémoratifs de la vie de nos héroïques collègues entre 1914 et 1918. Une recherche sur l’histoire de l’AAIHP dans cette période serait également intéressante à produire. Nous devrons y travailler. Je fais appel aux bonnes volontés et passionnés d’histoire.

Ch(è)r(e)s collègues, mesdames, messieurs je tiens à vous remercier encore de la confiance que vous témoignez au CA de l’Association. Rendez- vous en 2018.


* AG 2016 qui s’est tenue le lundi 20 mars 2017 à l’hôtel Scipion.